Bien l’Bourgeon est un festival porté par l’association culturelle Mix’Arts. Fondée en 2014, elle s’engage pour promouvoir et diffuser des groupes de musique et d’arts de rue dans la région Rhône-Alpes.
Le 19 décembre 2024, le festival annonce Médine en tête d’affiche de son édition 2025 sur ses réseaux sociaux, notamment Instagram. Le 10 janvier 2025, la programmation complète est publiée sur les comptes instagrams respectifs de Mix’Arts et Bien l’Bourgeon. Le département de l’Isère subventionne depuis 2019 cet événement. Il est donc identifié comme premier partenaire dans la description de la publication.
Le 25 avril 2025, la Commission permanente du Conseil départemental vote les « subventions de fonctionnement en faveur des pratiques, de la création et de la diffusion artistiques » (2025 CP04 E 24 66). Le président du département Jean-Pierre Barbier (LR) dépose un amendement de dernière minute pour retirer du rapport soumis au vote la demande de subvention du festival. À l’exception de Pierre-Didier Tchétché (IES), l’ensemble des élu·es vote cet amendement. Il n’existe pas de compte-rendu public du débat et de la délibération de cette réunion. Selon l’Union de la Gauche Ecologiste Solidaire (UGES), un groupe d’opposition de gauche au sein du Conseil départemental, cette décision a été « motivée oralement par la présence du rappeur Médine lors de ce festival ». Mix’Arts apprend par Pierre-Didier Tchétché le rejet de ses 4000€ de subventions à la fin de la réunion de la Commission permanente.
Les trois élus Isère Écologie et Solidarités ont par la suite présenté leur excuse par mail au festival et dénoncent « la brutalité du procédé ». Face à cette décision contrainte, ils ont donc déposé une requête pour modifier leur vote, mais le département a rejeté cette demande. Ils réaffirment auprès de l’association que : « le retrait brutal de cette subvention à un mois seulement de l’événement est irrespectueux pour l’association, ses bénévoles et pour le monde culturel dans son ensemble ». Les quatre élus Les Écologistes témoignent alors de leur soutien envers Mix’Arts et Bien l’Bourgeon.
Suite à cette Commission permanente, le directeur artistique du festival Fabien Givernaud prend contact avec le département et les élus de l’opposition pour comprendre leurs motivations. Le 23 mai 2025, Mix’Arts et Bien l’Bourgeon publient un communiqué de presse et affirment n’avoir eu aucun retour de la part de Jean-Pierre Barbier. L’association déclare qu’elle regrette un manque d’informations et de transparence : « Nous sommes dans le flou total. On nous invisibilise totalement. » Elle affirme que : « la perte de cette subvention constitue un coup dur pour notre structure. » De même, elle rappelle que Médine ne fait l’objet d’aucune condamnation.
Ce même jour, Médiapart publie un article qui partage notamment la position des élus sur la question. Le service de presse du Département convoque alors la souveraineté des collectivités territoriales sur la question des subventions. Dans une déclaration adressée à Médiapart, le parti d’opposition UGES défend également sa position. Il explique sa décision par la condamnation des « valeurs véhiculées » par Médine. Les élus assument un choix politique, pour éviter « une posture floue » de la gauche et réaffirment leur « lutte contre l’antisémitisme, la xénophobie et le racisme ».
Contactés par Médiapart, les élus Les Écologistes renouvellent dans un communiqué leur soutien à Bien l’Bourgeon et alertent sur le respect des libertés culturelles et de programmation : « Faut-il désormais que les artistes partagent les convictions politiques de l’exécutif départemental pour être programmés sans risque de représailles financières ? »
Pour sa 8e édition, le festival s’est tout de même tenu du 29 au 31 mai 2025 à Gresse-en-Vercors et a accueilli Médine sur sa scène. L’association a choisi de ne pas engager un recours juridiques à l’encontre de la décision de retrait de subvention du Conseil départemental de l’Isère.
Cette entrave financière vient directement remettre en question les libertés de création et de programmation, assurées par la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine. Le festival déclare : «Nous remarquons, depuis quelques années, de nombreuses pressions politiques et médiatiques pour interdire des programmations, des artistes, des diversités d’expressions et d’opinions. Pour nous, acteurs culturels, ce phénomène pernicieux fait craindre la fin de la liberté d’expression qui est le socle de notre société démocratique. »
