I – Contexte et caractérisation des faits
Les 17 mai et 23 juin 2019, plusieurs femmes soutenues par l’association Alliance Citoyenne de Grenoble organisent une action de désobéissance civile en allant se baigner dans des piscines grenobloises en maillot de bain couvrant.
Les 23 juin et 3 juillet 2019, l’Alliance Citoyenne de Villeurbanne et le collectif « Entre Sœurs Lyon, Les femmes de confession musulmane » interpellent Jean-Paul Bret, maire de Villeurbanne, à deux reprises par courrier, afin de demander une modification du règlement intérieur des piscines pour permettre le port du maillot de bain couvrant.
Le collectif organise ensuite deux réunions à la Maison des initiatives, de l’engagement, du troc et de l’échange (MIETE), située dans le centre commercial La Perralière à Villeurbanne, où l’Alliance Citoyenne dispose de locaux. Ces réunions portent sur la possibilité de se baigner en burkini dans les piscines municipales.
Le 2 juillet 2019, le conseiller municipal d’opposition Jean-Wilfried Martin (Les Républicains) écrit au maire pour l’interroger sur « une quelconque action afin que les locaux de la MIETE ne soient plus le lieu de réunion d’associations ou de collectifs qui cherchent à battre en brèche notre idéal républicain ».
Le 19 juillet, dans Le Progrès, Jean-Paul Bret répond : « Il n’y aura pas de rétorsion financière contre la MIETE. Ils ne sont pas hors la loi. […] La liberté d’association est importante. »
Les demandes de rendez-vous avec le maire restent sans suite. Jean-Paul Bret déclare publiquement ne pas vouloir rencontrer les collectifs, qualifiant leur démarche de provocation, et invoque la nécessité de respecter les règlements municipaux.
Le 18 juillet 2019, le directeur de la MIETE annonce la suspension de l’accès aux locaux pour l’Alliance Citoyenne et le collectif de femmes musulmanes : « Dans l’attente d’une réunion du conseil d’administration […], il a été décidé de suspendre l’accès aux bureaux, salles d’activités et salles de réunion pour l’Alliance Citoyenne. »
II – La justification de la privation de locaux
Le 2 septembre 2019, la MIETE tient un Conseil d’administration pour discuter du cas de l’Alliance Citoyenne. Il est alors décidé de ne pas intégrer l’association au sein du Conseil d’administration, au motif public qu’elle recourt à la désobéissance civile.
L’Alliance Citoyenne a cependant eu connaissance de motifs restés privés : la MIETE ne se sentait pas en capacité de gérer les polémiques générées par certaines actions, craignant notamment une mise en porte-à-faux avec les financeurs publics. De plus, les projets accompagnés par l’Alliance Citoyenne sont portés par des personnes autonomes, rendant difficile toute garantie sur les actions menées.
Les actions collectives et la logique conflictuelle de l’Alliance Citoyenne sont donc perçues comme trop coûteuses pour la MIETE, tant en termes de gestion interne qu’en risques vis-à-vis des institutions partenaires.
Il est à noter qu’aucune opposition explicite n’est formulée à l’encontre de la nature des demandes des femmes musulmanes. La position de la MIETE s’articule plutôt autour de l’impact du clivage et des tensions générées par ces revendications.
L’Alliance Citoyenne n’a pas réagi publiquement à cette éviction.