Le 18 octobre 2023, à la fin d’une réunion avec la préfecture, le sous-préfet reproche à l’ASTI Petit-Quevilly d’avoir relayé un appel à manifester suite au meurtre de Nahel par un policier en juin 2023. Pour le sous-préfet, puisque la manifestation a été interdite, en appelant à y participer, l’association n’a pas respecté le contrat d’engagement républicain (CER). Il prévient l’association que le non-respect du CER peut entraîner l’arrêt des subventions publiques de la ville.
Le 29 janvier 2024, un formateur de l’association régionale des oeuvres éducatives et de vacances de l’éducation nationale (AROEVEN) écrit à l’ASTI, et lui annonce qu’ils ne pourront pas mener à bien un projet commun d’éducation à un “usage raisonné des écrans” en raison d’un “contrordre de l’ARS” de Normandie. Dans son courriel à l’ASTI, l’AROEVEN transfère en copie l’alerte de l’ARS signée par la chargée de mission prévention et promotion santé, qui écrit avoir été “alertée par la préfecture de Seine-Maritime. En effet, cette dernière [l’ASTI] n’a pas respecté le CER”. Sans notification officielle de l’ouverture d’une procédure pour violation du CER, l’association interroge la préfecture à plusieurs reprises.
Le 14 février 2024, l’association apprend par une information orale, donnée par une déléguée du préfet, qu’elle n’aura plus de subventions publiques de la Ville, ni de renouvellement de convention de ses postes adultes relais, au motif du non-respect du CER. L’association décide de contacter une fois de plus le préfet.
Le 26 mars 2024 par courrier, le préfet de Normandie répond à l’ASTI : “Les deux demandes de subventions au titre de la politique de la ville sont restées sans réponse car en cours d’arbitrage… Les décisions vous seront notifiées par écrit prochainement.”
À la fin du courrier, le préfet ajoute qu’“Au-delà de ces éléments et sans lien avec eux, je suis conduit à relever les positions exprimées par votre association suite aux émeutes de l’été 2023 et notamment les jugements que vous portez précisément sur les services de police que je ne peux approuver. Ces éléments me conduisent à vous rappeler qu’il est attendu d’une association qui sollicite des subventions publiques de conserver une posture républicaine et de s’abstenir de toute action portant atteinte à l’ordre public conformément aux engagements pris.”
En avril 2024, alors que le comité d’instruction de la ville de Rouen s’est réunit en février, l’association est toujours sans nouvelles de ses demandes de subvention.
Le 15 avril 2024, le chargé de projet politique de la ville au sein de la Métropole Rouen Normandie indique par courriel que “votre décision de ne pas adhérer au CER a pour conséquence : de ne pas figurer sur la plaquette “axe de lutte contre les discriminations”, décision partagée par l’ensemble des partenaires institutionnels lors de la réunion du 22 janvier 2024. De ne pas financer les projets proposés par une association ne signant par ce CER. Décision unanime des partenaires lors du comité d’instruction politique de la ville du 6 février 2024”.
Pourtant l’ASTI affirme avoir signé l’attestation relative au respect du CER.
Le 22 avril 2024, l’association adresse un courriel à la secrétaire générale de la politique de la ville. Elle demande les éléments permettant d’affirmer que l’association ne respecte pas “une posture républicaine”, et à quel moment l’association a-t-elle porté atteinte à l’ordre public. L’association n’a jamais reçu de réponse.
Le 6 mai 2024, l’ASTI de Petit-Quevilly informe publiquement être menacée de retraits de subventions pour avoir, selon la Préfecture, manqué au contrat d’engagement républicain.
Interrogés dans la presse, les différents acteurs modifient sensiblement leur position. La préfecture de la Seine-Maritime indique reprocher à l’association de s’être “positionnée sur des appels à prendre part à des manifestations interdites. Une telle attitude est contraire aux engagements souscrits au titre du CER”. Et affirme que le montant total des demandes de subventions qu’elle a reçues “est supérieur de plus de 50% à l’enveloppe Etat prévue pour ce territoire” ; et que donc toutes ne pourront être satisfaites. La préfecture précise avoir rappelé à l’association qu’elle avait eu une attitude contraire aux engagements souscrits dans le cadre du contrat d’engagement républicain.
La métropole, de son côté, ne reproche plus à l’association de ne pas avoir signé “son CER”, et explique que l’Etat avait indiqué avoir porté en décembre un “avertissement sur la position non acceptable de l’association au moment des émeutes de juillet 2023”.
Et l’ARS de Normandie indique que le dossier de l’association est en cours d’instruction, et qu’il n’y a pas de sanction à l’égard de l’association.
En juin 2024, les demandes de subventions pour l’année 2024 de l’association sont toujours sans réponse.
Le 6 juin 2024, l’association publie une lettre ouverte au Préfet de la Seine-Maritime. Et demande à la préfecture de recevoir une délégation des organisations signataires “dans les meilleurs délais afin de clarifier cette situation préjudiciable à cette association”.
Le 26 juin 2024, l’association est reçue par la préfecture, la sous-préfète à la ville évoque alors des “arbitrages budgétaires” et considère que l’ASTI n’avait pas une “position républicaine sur la police”.
Suite à cette réunion, l’ASTI a demandé à la préfecture un compte-rendu des échanges, mais cette demande est restée sans réponse.


