146. Le département du Rhône retire les subventions de trois associations environnementales après un courrier pour sensibiliser les élu·es aux risques d’un projet de port de plaisance

Présentation de l’Entrave

En mars 2025, sept associations environnementales rhodaniennes interpellent les élus locaux sur les risques économiques et environnementaux d’un projet de port fluvial à Anse. Suite à ce courrier, le Conseil départemental vote une suppression de subventions de 82 000 € pour trois d’entre elles. Le président qualifie les organisations “de danseurs aux pieds nus” et annonce que les associations partenaires de la politique environnement naturel sensible ne doivent pas critiquer les projets de la collectivité. 

Description complète du cas

Conçu dans les années 1990, le projet de port plaisance du Bordelan, est abandonné, puis repris au début des années 2010. Ce projet prévoit la construction d’un port de plaisance avec son grand bassin, d’une zone d’activité (Zac) de 14 hectares pour des activités industrielles tertiaires, un pôle de vie avec des logements et des commerces et un pôle loisirs et hébergements (et parkings). En attendant le début des travaux, des fouilles archéologiques ont été autorisées sur le site. Censés débuter en 2025, les travaux de la plateforme sont entamés dès 2020. 

En septembre 2023, cinq associations s’inquiètent des conséquences environnementales du projet, et envoient une lettre au maire d’Anse ainsi qu’au directeur de projet. Dans ce courrier, les associations demandent notamment l’accès aux documents techniques, au calendrier ainsi que la liste des procédures réglementaires auxquels le projet de port est soumis. 

Suite à cette première interpellation, les élu·es locale·aux avaient répondu qu’“Il n’y a rien de moins naturel que ce site, puisque c’était celui de l’aérodrome de Villefranche il y a 50 ans. Nous avons créé le plan d’eau et renaturé la zone qui reste une création de l’Homme : on veut continuer à travailler sur l’amélioration de ce secteur”. Ils et elles ajoutent que les procédures de contrôles environnementaux du projet avaient toutes eu lieu, et que le projet avait les accords de la Haute autorité environnementale pour aménager la plateforme. 

En mars 2025, ce sont sept associations Arthropologia, Demain, c’est ici et maintenant, France nature environnement, le Groupe national de surveillance des arbres, la Ligue de protection des oiseaux, Nous voulons des coquelicots et Alternatiba qui adressent un courrier aux élu·es locale·aux au “sujet du projet de plaisance de Bordelan à l’Anse”. 

Les associations y expriment leurs inquiétudes quant à l’impact du projet de construction. Elles soulignent les risques environnementaux inhérents à l’artificialisation de 30 hectares de zones naturelles humides et mettent en avant l’existence de plusieurs d’infrastructures fluviales fonctionnelles sur le territoire. Au-delà, les associations questionnent l’économie du projet. Dans un contexte de hausse de la dette publique, l’État enjoins les collectivités territoriales à des restrictions financières. Dès lors, les associations questionnent l’intérêt de cet investissement de 39.5 millions d’euros. Enfin, elles témoignent de l’opposition d’une partie de la population locale, signataire d’une pétition lancée par les associations. 

Le 4 avril 2025, le président du Conseil départemental du Rhône fait voter un amendement visant à supprimer les subventions allouées à trois des sept associations à l’origine du courrier. Les trois associations sont ainsi écartées de la politique départementale de préservation et de mise en valeur des espaces naturels sensibles. 

Pour se justifier, le président du département dénonce le fait que les associations critiquent les politiques publiques : “On ne peut pas critiquer un projet d’une collectivité et continuer à travailler avec elle”. 

Lors de cette même séance du conseil départemental, il disqualifie oralement les différentes associations : “J’en ai assez de ces associations de danseurs aux pieds nus !”, ou encore “Moi je ne suis pas prêt à ce que mes enfants mangent des graines tous les jours, fassent de la bicyclette tous les jours.”. Tout en les nommant “ces dites associations”. 

FNE Rhône perd 29 040 euros, LPO AuRA 28 350 euros et Arthropologia 24 413 euros, pour un total de 81 803 euros. 

Pour les associations touchées par ces coupes-sanctions de subventions il s’agit d’une “sanction politique destinée à faire taire toute voix dissidente”. 

Dans un mail transmis à France 3 Rhône Alpes, le département oppose les intérêts du territoire et les engagements environnementaux des associations. Il annonce une volonté plus large d’écarter ces partenaires de la politique espace naturel sensible : “L’Assemblée départementale a suspendu les subventions aux associations  suivantes : Arthropo-logia, France Nature Environnement et la Ligue de  protection des oiseaux. Cette décision s’inscrit dans le cadre d’une réflexion plus globale autour des Espaces naturels sensibles (ENS) permettant de re-centraliser cette politique à l’échelon départemental. La collectivité aurait ainsi la garantie que les actions entreprises dans le cadre de cette politique ENS s’inscrivent en faveur du territoire rhodanien et pas dans un but militant. »

Suite à cette perte massive de trésorerie, les associations ont prévu de solliciter une rencontre avec le président du département. 

En mai 2025, FNE Rhône annonce avoir été placé en redressement judiciaire.


Type d’action collective santionnée

Interpellation par courrier des élu·es départemental·aux sur les risques environnementaux liés à un projet de port de plaisance

Institutions Responsables

Conseil départemental et président du Conseil départemental du Rhône

Conséquences pour l’Association

Conséquences sur la pérennité des structures. le 29 avril le tribunal des activités économiques de Lyon a placé FNE Rhône en redressement judiciaire ; l’association a lancé une campagne d’appel aux dons pour sauver ses 20 salariés

Pour les associations les équipes salariées sont en jeu. Mais aussi, un impact sur la charge de travail des salariés, avec la nécessité face à la situation de réduire leurs missions d’amélioration des connaissances sur certaines espèces

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