149.La Région Ile-de-France retire 50 000 euros de subvention à l’Inter-LGBT après la publication d’une affiche “contre l’internationale réactionnaire” pour la Marche des Fiertés parisienne

Nom de l'association : Inter-LGBT
Thème de l’association : ,
Date de l'Entrave : 2025

Présentation de l’Entrave

L’Interassociative lesbienne, gaie, bi et trans (Inter-LGBT) est un collectif d’associations qui organise notamment la Marche des Fiertés parisienne. Pour l’édition 2025, le collectif a choisi de mettre en avant sur une affiche la lutte contre “l’internationale réactionnaire”. Le visuel a provoqué de nombreuses réactions. Sur les réseaux sociaux, internautes et personnalités publiques ont disqualifié l’association et parfois tenu des propos violents. La ministre Aurore Bergé demande le retrait de l’affiche et la fin du partenariat avec la DILCRAH. Valérie Pécresse coupe 50 000 euros de subventions de la Région Ile-de-France. D’autres partenaires financiers privés annoncent retirer leurs subventions ce qui met en danger la pérennité de la marche parisienne.

Description complète du cas

En mai 2025, lors d’une réunion de préparation de l’édition 2025 de la Marche des fiertés, l’Inter-LGBT présente un brouillon de l’affiche. Lors d’un vote, deux associations sur 18 s’opposent à l’affiche ; la fédération sportive LGBT+ et l’association OUTrans. 

Le 3 juin, l’Inter-LGBT dévoile dans L’Humanité son affiche pour la Marche des Fiertés parisienne du 28 juin 2025. Le mot d’ordre de la marche est “Contre l’Internationale réactionnaire / Queers de tous les pays, unissons nous”. L’affiche répresente sept personnages dont une personne trans, un militant d’Act Up, une femme portant un voile et une autre avec un pin’s du drapeau palestinien et dont le sac mentionne ‘Free Prides” etc. Le dernier personnage tient par la cravate un homme étourdi avec une croix celtique dans le cou, pour l’artiste cela symbolise la lutte contre le fascisme. 

Le 3 juin sur X (anciennement twitter), le président de Beit Haverim, une association membre active de l’Inter-LGBT, déplore que l’ “Affiche de la Marche des Fiertés 2025 : femme voilée, drapeau palestinien… mais aucune kippa, croix ou autres luttes. Pourquoi toujours les mêmes symboles ? Et pourquoi ignorer les LGBTQ+ persécuté-es à Gaza, en Iran, en Chine, au Myanmar ?”. Et dans des courriers internes (consultés par Médiapart), l’association dénonce la surreprésentation “de symboles liés à la Palestine et à la religion musulmane”, ainsi que “l’absence totale de débat ou de validation collective”. 

Le 4 juin, lors d’une réunion de plusieurs associations avec la présidente de la Région Ile-de-France, le président et porte-parole de Beit Haverim dit l’avoir alertée sur cette affiche : “Je l’ai alertée sur cette affiche qu’elle n’avait pas vue et j’ai dit que je voulais qu’elle soit changée. Je ne comprends pas cette scène d’une extrême violence […] la présence du drapeau palestinien, ou du triangle rouge, symbole repris par Mélenchon”. 

Le même jour sur X, Valérie Pécresse déplore l’affiche mais sans évoquer les subventions de l’association : “La région Ile-de-France, qui contribue à la sécurisation de la marche, refuse d’être associée à cette affiche qui incite à la violence avec son cadavre renversé ! Nous refusons tout message qui peut inciter à des débordements de haine”. Ce n’est que le lendemain, qu’elle annonce sur X couper les subventions de l’association : “La Région IDF a demandé le retrait de son logo et la subvention ne sera pas versée”. Une subvention qui finance un ensemble d’événements, et pas uniquement la marche. 

Dans un courrier à l’association, la Région IDF affirme qu’elle aurait dû être obligatoirement “consultée” avant la publication de l’affiche.  

A Mediapart, la vice-présidente de l’Inter-LGBT pointe des manquements liés aux subventions antérieures. En effet la Région n’a “jamais financé la pride de 2023 que l’Inter-LGBT lui réclame depuis plusieurs mois” . 

Le 5 juin, l’association Beit Haverim publie un communiqué dans lequel elle reproche les possibles interprétations antisémites de l’affiche, et demande son retrait : “Dans un climat où les Israéliens sont traités sur les réseaux sociaux de « nazis » ou de « nazi-sionistes », cette imagerie fait craindre des glissements idéologiques ou des lectures antisémites sous-jacentes, notamment si l’on associe ce cadavre à une figure « blanche », silencieuse, et marquée de symboles d’extrême droite. » D’autres associations membres de l’Inter-LGBT, comme l’association FLAG ! (association des agents des Ministères de l’Intérieur et de la Justice, Pompiers, Policiers municipaux et ses alliés) demandent le retrait de l’affiche.

Le même jour, de nombreuses personnalités politiques commencent à exprimer leur opposition à cette affiche. La DILCRAH annonce sur X qu’“À la demande de la ministre Aurore Bergé, nous avons demandé que la DILCRAH ne soit en aucun cas associée à cette affiche et que notre logo en soit retiré. La lutte contre la haine LGBT+ ne saurait passer par l’incitation à la violence ou à la haine”. Le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau : “Ça n’est rien d’autre que de l’incitation à la violence, cette affiche montre l’extrême “gauchisation” des associations organisatrices. Si l’objectif est de diviser, c’est réussi”

C’est aussi le cas d’entreprises, qui menacent elles-aussi de retirer leurs subventions. Comme Paypal qui dans un courrier envoyé à l’association annonce retirer 10 000 euros. Ou la RATP qui déclare mettre fin à son partenariat avec l’association car le mot d’ordre de la marche ne respecterait pas “les principes de neutralité et de laïcité” du groupe. ll était prévu que la RATP diffuse dans ses gares une communication, qui n’était pas l’affiche. 

Le 11 juin, sur BFM-TV, Valérie Pécresse répète que personne n’a validé cette affiche, ce qui est “contraire à toutes les règles de subventionnement de la région”.  Et que par conséquent, la subvention régionale ne sera pas versée à l’association.

Néanmoins, certaines associations et personnalités politiques ont pu apporter leurs soutiens à l’Inter-LGBT. C’est le cas de SOS homophobie qui affirme que “ces coupes budgétaires n’empêcheront pas le déroulé de la Marche, mais elles relèvent d’une intimidation et d’un opportunisme politique honteux. Elles ne visent qu’à masquer les véritables revendications d’un événement militant essentiel”. Mais aussi Ian Brossat, sénateur PCF de Paris, qui critique la décision prise par la présidente de la Région IDF, et énonce que “La violence n’est pas dans cette affiche mais dans les agressions contre les personnes LGBT”. 

Le 19 juin, en commission permanente de la Région Ile-de-France, le gèle des 25 000 euros de subvention pour l’édition 2023 de la Marche des fiertés est confirmé par l’exécutif de la Région IDF. Lors de cette commission, un amendement du groupe Rassemblement national à la région IDF est discuté. Cet amendement propose la suppression du versement d’une subvention de 25 000 euros pour le financement de l’édition 2023 de la Marche des fiertés. Finalement, l’amendement n’est pas défendu par le RN, puisque la décision de couper cette subvention a déjà été prise par la présidente de Région. En séance, l’exécutif précise que la décision de la présidente à été prise dès le 4 juin lorsque celle-ci a découvert l’affiche, lors d’un déjeuner organisé autour d’associations LGBTQ+ : “A partir du moment où les obligations contractuelles ne sont pas respectées ce sont les subventions en cours qui sont coupées” (Geoffroy Didier, président déléguée du Conseil régional d’IDF). 

Pour l’Inter-LGBT, le retrait des subventions régionales “témoigne d’une volonté de silenciation de notre mouvement et de nos revendications”. Le collectif annonce que ni le parcours, ni l’affiche, ni le mot d’ordre de la marche ne changeront. Quant à la subvention de 2023, l’association annonce vouloir entamer des recours juridiques.

Type d’action collective santionnée

Publication d’une affiche contre “l’internationale réactionnaire”  pour l’édition 2025 de la Marche des fiertés

Type d’assaillant

Institutions, entreprise publiques, entreprises privées

Institutions Responsables

La Région Ile-de-France, la DILCRAH

Conséquences pour l’Association

 La perte financière est estimée à 75 000 euros. La scène musicale (podium) prévue à l’issue de la marche n’est donc pas maintenue (mais remplacée par “une structure moins ambitieuse”). L’Inter-LGBT a lancé une cagnotte de soutien. Et l’association craint pour la sécurisation de la marche. 
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